Secteur Privé et Développement - Hors série Nouveau sommet Afrique France

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OPINION

Le numérique, voie royale pour le financement des PME africaines Matthew Gamser, Directeur général, SME Finance Forum (SFI)

L’innovation peut-elle jaillir d’une quasi-destruction ? L’avĂšnement du numĂ©rique, qui a en partie conduit Ă  la crise financiĂšre mondiale de 2007-2008, pourrait-il du mĂȘme coup favoriser l’accĂšs des PME aux financements dont elles ont besoin pour continuer de jouer leur rĂŽle, absolument crucial, sur le continent africain et ailleurs ? Matthew Ganser se souvient du lancement de la revue Secteur privĂ© & DĂ©veloppement, il y a plus de dix ans, et retrace le chemin parcouru jusqu’aux « super autoroutes » de l’information numĂ©rique qui relient aujourd’hui les PME africaines Ă  des solutions venues du monde entier, notamment en matiĂšre de financement.

Cet article a initialement été publié dans le n° 32 « Financement des PME en Afrique : quoi de neuf ? », paru en septembre 2019.

UN ARTICLE DE MATTHEW GAMSER Matthew Gamser, Directeur gĂ©nĂ©ral, SME Finance Forum (SFI) Matthew Gamser est le directeur gĂ©nĂ©ral du SME Finance Forum, le forum sur le financement des PME de la SociĂ©tĂ© financiĂšre internationale (SFI). Il dispose de plus de quarante ans d’expĂ©rience dans le dĂ©veloppement du secteur financier et l’accompagnement des PME. Il a ƓuvrĂ© pendant quatorze ans au sein de la SFI, oĂč il a occupĂ© diffĂ©rents postes, Ă  Washington et Ă  Hongkong, se concentrant en particulier sur le financement des PME et le dĂ©veloppement des services financiers. Avant cela, il a passĂ© vingt-cinq ans dans le conseil en management et occupĂ© des fonctions de direction dans une ONG internationale. Il est titulaire d’une licence et d’un master de l’universitĂ© d’Harvard, ainsi que d’un master et d’un PhD de l’universitĂ© du Sussex (Royaume-Uni).

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a relecture du premier numĂ©ro de la revue Secteur privĂ© & DĂ©veloppement, publiĂ© en 2009, est particuliĂšrement Ă©difiante. Cette premiĂšre Ă©dition s’ouvrait sur un article de Paul Collier soulignant que « les banques africaines venaient de commencer Ă  s’intĂ©resser aux PME lorsque la crise financiĂšre mondiale a inversĂ© la tendance ». Le risque Ă©tait donc de voir les PME privĂ©es de cet accĂšs aux financements Ă  long terme dont elles ont tant besoin. La situation ne s’amĂ©liorera, disait-il, qu’à condition d’une meilleure circulation de l’information sur les marchĂ©s d’Afrique subsaharienne, permettant aux investisseurs de mieux identifier les PME de qualitĂ©. Il concluait ainsi : « Un usage bien adaptĂ© des nouvelles technologies de l’information devrait apporter la solution. » Ces propos Ă©taient clairvoyants. Nous avions vu le numĂ©rique transformer des prĂȘts immobiliers subprimes en instruments financiers toxiques, qui ont bien failli conduire Ă  l’effondrement du systĂšme financier international. Nous ignorions alors que ce mĂȘme numĂ©rique pourrait changer la donne pour les PME en Afrique. Aujourd’hui, nous commençons Ă  comprendre le potentiel de la transition numĂ©rique pour ce continent : sur d’autres marchĂ©s, et en parti-

culier en Chine, nous avons en effet constatĂ© que celle-ci peut combler de façon trĂšs rapide les dĂ©ficits de financement. L’importance des PME pour la croissance Ă©conomique Ă©tait dĂ©jĂ  bien connue. Mais les raisons de leurs difficultĂ©s de financement faisaient dĂ©bat. Julien Lefilleur, Ă  l’époque chargĂ© d’investissement pour Proparco, considĂ©rait que la titrisation et les prĂȘts garantis pouvaient permettre de compenser efficacement les asymĂ©tries d’information et de stimuler le financement des PME. Chez Bank of Africa, Paul Derreumaux abondait dans son sens, appelant en outre Ă  la mise en place de dĂ©partements spĂ©cialisĂ©s sur les PME et de produits alternatifs tels que le leasing ou la mutualisation de garanties pour les crĂ©dits aux entreprises. Patrice Hoppenot, de l’Institut panafricain pour le dĂ©veloppement (IPD), appelait pour sa part Ă  ne pas perdre de vue l’apport en capital et l’assistance technique, en complĂ©ment des financements Ă  long terme. Paul Collier Ă©tait ainsi le seul Ă  Ă©voquer les technologies de l’information. Les autres auteurs privilĂ©giaient l’intervention « humaine » (spĂ©cialisation et innovation produit), reflĂ©tant en cela les thĂšses qui prĂ©valaient Ă  l’époque pour rĂ©sorber les dĂ©ficits de financement sur les marchĂ©s Ă©mergents.


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